Critique Concert Beethoven

Revue de presse

UN BEETHOVEN GRANDIOSE ET ORCHESTRAL

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27 November 2019

Un programme exclusivement consacré aux œuvres orchestrales de Beethoven a ouvert le nouvelle saison artistique des Siècles Romantiques à la Chapelle de la Trinité de Lyon. L’hommage du chef Jean-Philippe Dubor au Maitre de Bonn a su émouvoir le public attentif et conquis par la puissance de la musique.

Jean-Philippe Dubor, directeur artistique des Siècles Romantiques et précieux chef d’orchestre lyonnais, nous avait déjà délecté avec des concerts beethoveniens dans le passé, parmi lesquels nous tenons à citer le splendide triptyque composé par le Concerto n°5 dit « L’Empereur », des extraits du « König Stephan », et le Finale de la 9e Symphonie en 2018. Ce 27 novembre l’attention s’est en revanche focalisée strictement sur la force de l’orchestre, afin de sublimer le travail puissant et mémorable que le génie de Beethoven a su réaliser et offrir à toute humanité. La soirée débute avec l’ouverture Coriolan écrite en 1807, inspirée directement du mythe reporté par Plutarque. Conçue comme introduction musicale au drame, tombé dans l’oubli, de Heinrich-Joseph von Collin, Coriolan a su imposer sa force afin d’atteindre une indépendance qui la place aujourd’hui parmi les plus belles compositions de maître. Il s’agit d’un poème symphonique qui intègre la composante psychologique dans le développement de l’œuvre. Le chef Dubor et son orchestre se trouvent à merveille dans cette composition dualistique, où la contraposition et l’affrontement entre deux âmes se transforment dans une double thématique musicale qui, sans parvenir à une solution, se laisse dissoudre dans une résolution mortelle. Le thème fort de l’action de Coriolan trouve sa contrepartie pathétique dans le thème des femmes (ou des « souvenirs ») : ce dernier accueillera le premier, dans un pur geste féminin d’ouverture et de pardon où l’élément historique du sacrifice devient étreinte éternelle amoureuse.

Une deuxième ouverture clôture la première partie du concert : c’est la Léonore III. Dernière version écrite par Beethoven pour son unique opéra Fidelio, cette ouverture est sans aucun doute la plus équilibrée, la plus incisive parmi les quatre versions produites par le maître. Le final extraordinairement puissant du Presto est interprété avec une très belle énergie et une précision rare. La ponctualité et la rigueur sont mises ici au service de la recherche d’une émotion qui évite toute émotivité. Le programme duborien s’avère, encore une fois, fidèle à lui-même.
L’entracte s’impose comme nécessaire pour permettre aux musiciens et au chef de respirer et également aux auditeurs de retrouver le calme avant de replonger dans le maelstrom beethovenien. La grandiose 7e Symphonie el la majeur constitue la deuxième partie du concert. Conçue en 1811-1812, elle sera présentée pour la première fois le 8 décembre à l’Université de Vienne, et redonnée une deuxième fois seulement quelques jours plus tard, le 12 décembre, rencontrant un franc succès qui marquera le début de sa légende. Le premier mouvement, le Poco Sostenuto, est extrêmement riche et athlétique, alternant des trajectoires verticales vertigineuses et des oscillations horizontales de grande envergure. L’Allegretto, grand « tube » de la musique romantique alterne des tons épiques, mélancoliques et dramatiques, tous reliés par des thèmes quasi-ostinati, rythmés et inébranlables. Ce mouvement atypique au sein de la composition de Beethoven représente une véritable perle élevée au rang d’élément ultra-humain entre les mains du chef Dubor. La direction précise semble le transcender et le nimbée d’un aura presque palpable. Le troisième mouvement Presto reprend l’élan et le discours interrompu auparavant à travers la coexistence de force et vigueur, où les vents accentuent l’élévation épique. Le ton triomphant de l’Allegro con brio final marque la conclusion de l’œuvre déployant la masse sonore avec une perfection qui relève du génie. C’est avec conviction et générosité que le chef Dubor dépense ses dernières énergies dans un grand final joyeux dissipant toute mélancolie pour un dernier souffle de liberté et de splendeur.

Fabrizio Migliorati

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